Artiste majeur de la scène contemporaine, Christian Silvain est né à Eupen (Belgique) en 1950.
Christian Silvain a été un artiste précoce. Enfant déjà, il n’a que quatre ans, le dessin le fascine. Il y trouve un refuge. C’est la découverte d’un tableau de Paul Delvaux qui, plus tard, éveille et décide sa vocation de peintre. Habité par la frénésie de la création, il commence à exposer à l’âge de 21 ans. Après un bref passage par la gravure et la sculpture, il se tourne dans les années 80 vers un art poétique qui se nourrit du travail d’enfants autistes ou handicapés. A la fin des années 80 commence sa période de façades, pendant laquelle il s’exprime par le graffiti et les tags. Du « Street Art » avant l’heure. C’est à partir de 2002 qu’il s’oriente vers des œuvres à l’acrylique noir grouillant d’objets et de personnages qui définissent son style actuel.
En 50 ans de carrière, Christian Silvain a participé à pas moins de 405 expositions, dont certaines organisées par des galeries de renom ou des institutions comme le Musée Ludwig (Cologne) qui consacre une exposition à sa série « Les prisonniers ». Ses œuvres font partie de plus de 70 musées dans le monde.
La fondation Christian Silvain fut créée en 1992 et possède environ 475 œuvres de l'artiste, regroupant des tableaux de toutes les périodes, depuis son enfance à aujourd’hui. Son siège est situé à Kluisbergen.


La création selon Christian Silvain

Il existe un style Christian Silvain pétri de détails et d’une extraordinaire frénésie dans la composition de ses rêves picturaux.
Forgé au fil d’années de travail, il affirme ainsi sa volonté de se tenir éloigné de toute tendance ou catégorie d’école. Ce qui désoriente certainement l’amateur d’art.... Difficile de classer quelque part ce rebelle qui se bat contre « l’art-gent » et qui nie le conceptualisme. Il se proclame de la figuration libre. Certes. Mais bien qu’à première vue ses toiles semblent figuratives, on pourrait presque les qualifier d’abstraites. Tant la virtuosité de tous ces multiples objets et personnages,
reproduits de manière récurrente et à l’envie, s’apparente à des coups de pinceau dont l’artiste façonne sa toile. Ils finissent par devenir invisibles.
Comme premier trait de son œuvre, une composition qui instaure un rapport bien particulier entre figure et fond. D’où émerge un motif principal, évident, de grand format. Associé à une saturation de la toile par la présence d’une chorégraphie grouillante. Une marque de fabrique qui le suit depuis ses débuts. Chaque détail, le plus petit soit-il, semble travailler à son propre compte. Et raconter son histoire. Parfois avec gravité et émotion, souvent avec humour. Dans cette sorte de
terrain jubilatoire, merveilleux et dense, les associations iconographiques évoquent l’enfant que Christian Silvain n’est plus.
Elles sont des traces de vie disparue, des confidences qui prennent racine dans un passé révolu, restauré et collecté de sa mémoire intime. Dans ce désir de garder son impulsion créatrice première, dans cette polyphonie, qu’on pourrait assimiler à de la musique, coexistent tous les niveaux de son propre « soi », les coulisses d’une vie. Comme une symphonie où les motifs récurrents deviennent les accords, les harmoniques et les notes de chaque partition.
La dimension émotionnelle est toujours présente dans cette nouvelle exposition. On y retrouve les mêmes couleurs pures et fortes. Le rouge et le bleu reviennent comme une ritournelle. Une fois encore, le jeu verbal apparaît et disparaît au gré des mots plaqués ça et là, avec humour et bouffonnerie. Mais l’affolement des objets et des personnages semble se calmer.
Après un passage par le chaos, une tourmente créatrice, et peut-être personnelle, Christian Sylvain laisse place dans son microcosme imaginaire à des motifs végétaux et à la texture. Il introduit l’épaisseur dans ses derniers travaux, renouant ainsi avec la matérialité, avec une troisième dimension qui caractérisait ses premières inspirations. Lorsqu’il composait ses cages en collectant des objets quotidiens ou de vrais jouets. Au cœur de ses obsessions, l’artiste mettrait-il en scène un défi contre le temps ? Comme si l’accumulation et l’archivage d’objets pouvait ancrer dans l’autrefois et conjurer l’inexorable passage de la vie.

Elisabeth Martin, 2015


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